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S'il existe une littérature virile, comme il existe une amitié virile, alors Jim Harrison pourrait bien être son principal représentant.
Ces "Légendes d'automne" ne sont pas quelques exquises bleuettes bucoliques lancées à tout vent, mais bien de sombres histoires de vengeance, trois récits denses comme des pierres tombales, au style dépouillé comme un cimetière battu par une bise hivernale...
Dans le premier de ces trois récits, le héros apparaît d'abord comme un corps meurtri, à peine vivant, balancé du coffre d'une voiture au milieu d'un désert. Recueilli par un médecin mennonite, il n'aura de cesse d'assouvir sa vengeance au dénouement inattendu.
Le second, au milieu de la quarantaine, jouissant d'une réussite sociale inespérée, est confronté au vide de son existence. Il décide, après la mort de son père; de changer de vie, de se dépouiller au profit de son ex-femme et de sa fille. Au détour d'une fête, il rencontre son destin sous les traits de deux malfrats minables dont l'un le menace de mort. Sa vengeance est à la mesure de son changement d'existance : imprévue...
Le troisième récit, au titre éponyme, se déroule sur de nombreuses années, depuis la première Guerre mondiale, à laquelle prennent part trois frères. L'un d'eux mourra au champ d'horreur, l'autre deviendra un politicien respecté tandis que le troisième se mue bien vite en aventurier sans scrupule, profitant de la prohibition pour s'enrichir par toute sorte de trafics. La vengeance, ici, s'insinue comme un poison qu'on instille entre les frères.
Chez Harrison, personne ne sort indemne : l'héroïsme le plus improbable côtoie la bassesse la plus immonde ou la grandeur la plus imprévisible, tout cela chez le même être. La vie a moins d'importance que l'honneur, dont la conception renvoie à des temps révolus. Et le style de Harrison, langue rauque et primitive, vous entraîne, vous charrie comme un torrent roule ses cailloux...