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Chez les amis
Parlons travail
--> Philippe Roth parle "cuisine" avec les plus grands
Non, il ne s'agit pas d'un recueil de recettes d'écrivains, mais d'un ensemble de conversations, d'interviews autour de l'écriture des plus grands écrivains, américains ou autres, par l'un de leurs pairs : Philippe Roth.

Celui-ci n'est plus à présenter : depuis "Goodbye Colombus", et surtout "Portnoy et son complexe", Roth s'est tracé un parcours intellectuel sans faute jusqu'à sa récente trilogie qui lui a valu de nombreux prix aux Etats-Unis et ailleurs (Pastorale américaine, J'ai épousé un communiste et La tache).

Dans ces textes denses et chaleureux à la fois, on découvre un Philippe Roth qu'on devinait à travers sa fiction, sa prose impeccable et ses personnages torturés : un intellectuel en prise avec les hommes et les évènements de son temps.

Pour Roth, c'est toujours l'affrontement entre une destinée singulière et le flux des mutations sociales qui forme la trame du récit, trame associée à une rare épaisseur des personnages, dont peu sortent indemnes de l'analyse implacable de l'auteur.

Il en va de même dans cette série d'échanges où chaque écrivain est invité à décrire son rapport à l'écriture et la place que tient cette dernière dans sa vie.

C'est ainsi que Primo Levi, l'auteur de "Si c'est un homme", raconte sa double vie d'écrivain témoin de la Shoah et d'ingénieur dans une usine de peinture d'Italie du Nord. L'une ne va pas sans l'autre, Levi considérant son travail de chimiste comme complémentaire de sa vocation d'écrivain.

Aharon Appelfeld décrit l'ironie de ses romans (précipitez-vous sur "Badenheim 1939", si ce n'est déjà fait !) comme la seule façon qu'il ait trouvée de renouer avec son enfance errante à travers la Pologne dévastée par la guerre et de défier ses propres démons.

L'interview d'Ivan Klima nous rappelle combien la clandestinité de la littérature tchèque a été un facteur décisif dans sa vivacité et dans son rayonnement international, notamment à travers l'oeuvre contestée par ses compatriotes d'un Milan Kundera.

Isaac Bashevis Singer justifie son choix du Yiddish comme s'imposant de lui-même alors qu'il fuit la Pologne vers les Etats-Unis. L'auteur du "Domaine" et autres "Ennemies" pouvait-il ressusciter ce petit peuple des ghettos autrement que dans sa langue ?

Milan Kundera, dans la synthèse de deux conversation praguoises, explicite sa conception du roman, et en particulier de son "Livre du rire et de l'oubli".

Edna O'Brien, interviewée dans son appartement londonien narre sa plongée dans ses souvenirs de petite fille irlandaise pour donner chair à ses personnages.

Pour Mary Mac Carthy, c'est un échange épistolaire sur un roman précédent de Roth (La contrevie) qui traite, entre autres, de l'antisémitisme et de l'incompréhension des Juifs devant certains rites chrétiens comme ceux de la Noël, par exemple.

C'est le souvenir d'un Bernard Malamud malade, quasi-mourant que convoque Philippe Roth et surtout, un écrivain en panne d'inspiration et qui sent sa fin prochaine.

Il rend hommage à Philip Guston, illustrateur de son roman "Le Sein", dans lequel un professeur d'université se retrouve transformé en sein... Guston qui, le premier, se plaignait de la cruauté de ses propres oeuvres avec sens peu courant de l'autodérision : "Vous savez, les gens se plaignent que je peins des horreurs. S'ils se figurent que ça m'amuse, moi, d'arriver ici tous les jours et de les voir au premier coup d'oeil ! Mais qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse ? Je teste les limites de ma résistance."

Le livre se clôt sur une analyse magistrale de quelques ouvrages de Saül Bellow, autre grand écrivain New Yorkais dont l'oeuvre est d'ores et déjà un classique.

C'est donc un ouvrage destiné à un public curieux, déjà initié à une partie non négligeable de la littérature américaine contemporaine que nous propose Philippe Roth. Au-delà, c'est un échange de "professionnels" sur leur vie, le sens de leur oeuvre, sur ce qu'ils croient nous apporter au travers de leur monde reconstruit...

Philippe Roth, Parlons travail, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Josée Kamoun, Paris, Gallimard, 2004, (Du Monde entier), 187 p.
 

Ecrit par Marco-Bertolini, à 13:16 dans la rubrique "Lire libre".



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